« Attentats de Bruxelles : nous devons imposer ce que nous sommes » – Entretien pour Aleteia
Retrouvez mon interview pour Aleteia suite à mon voyage au Maroc et aux attentats de Bruxelles.
Aleteia : Vous revenez tout juste du Maroc ou vous avez passé quelques jours à rencontrer les autorités politiques et religieuses… Quel regard portez-vous désormais sur cet ancien protectorat français ?
Jean-Frédéric Poisson : J’ai premièrement été frappé par l’amitié extrêmement solide qui demeure entre le Maroc et la France. Le pays a pris sont indépendance en 1956, mais des liens très étroits ont continué à se tisser entre nous, contrairement à la situation algérienne, nettement plus conflictuelle. J’ai vraiment pu le constater en rencontrant les présidents des deux chambres, des membres du gouvernement ou encore le directeur du Conseil économique et social. Mais j’ai également constaté une volonté et une réalité de développement assez impressionnantes.
C’est un pays qui est exceptionnel en Afrique, il est le plus stable politiquement de tout le continent. D’ailleurs, j’ai été le témoin d’un attachement très net à la monarchie et à la personne du roi, ainsi qu’un soutien populaire des grands projets de modernisation lancés ces 15 dernières années par Mohammed VI. En quelques années seulement, Casablanca est devenue une place financière qui compte. D’ailleurs, elle est 44ème dans le classement international qui place Paris en 37ème place ! La dynamique de développement est très intéressante.
Vous étiez également sur place pour parler de l’islam, de sa place en France, de la formation des imam. Qu’avez-vous constaté à ce sujet dans le pays ?
Le Maroc veut être le promoteur d’un islam pacifique, dont nous aurions grandement besoin. C’est donc un acteur avec lequel il est intéressant de parler en effet. J’ai visité un centre de formation à Rabat notamment, qui forme plus de mille imams venus d’une quarantaine de pays, et parmi lesquels trente sont français. Au delà de la formation religieuse, cette école leur apprend un métier.
Pour répondre à mon étonnement sur ce point, le directeur m’a expliqué que c’était un moyen d’échapper à l’islamisme. Lorsqu’ils n’ont pas de sources de revenus, les imams deviennent rapidement dépendants économiquement des radicaux qui les paient grassement en échange d’une diffusion de leurs messages. L’école de Rabat offre une réponse très pragmatique sur ce sujet.
Vous avez donc été conquis par le Maroc ?
Il y a vraiment de très bonnes choses et c’est un pays qui prend son avenir et son développement en main. Mais le Maroc paisible que j’ai vu donne également une place importante aux frères musulmans, ce qui pose un certain nombre de questions. Par ailleurs, le système éducatif est très faible, c’est le grand enjeu de l’avenir du pays. Il y a également la problématique du Sahara occidental : on sent une très grande tension entre l’Algérie et le Maroc sur le contrôle de cette région.
Pour revenir sur la formation des imams, est-ce une bonne chose qu’elle soit faite à l’étranger ? Cette école doit-elle être un modèle ?
Non, il doivent être formés en France, et en français. Mais nous pouvons imaginer un partenariat avec cette école marocaine ou avec l’université Al-Azhar (du Caire, la plus haute autorité intellectuelle islamique hors péninsule arabique, Ndlr) que j’ai visitée en septembre dernier. Je rappelle qu’aujourd’hui, la majorité des organisations musulmanes de France sont aux mains des frères musulmans, pendant que l’Égypte les déclare terroristes ! Il est impossible de continuer ainsi. Mais la formation est une question épineuse très difficile à gérer.
Dans le Coran, il existe ainsi deux lignes de fuite. L’une est incarnée par le soufisme, dégagé… Lire la suite sur le site d’Aleteia