Modernisation des règles de l’élection présidentielle : j’ai voté contre.
J’ai voté contre la proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle. voté hier contre la modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle.
Je suis notamment favorable à ce que pendant 5 semaines, un petit candidat puisse avoir le même temps de parole qu’un autre. La présidentielle, ce n’est pas le concours des personnes les plus influentes du pays, mais une compétition entre des personnes qui ont recueilli la confiance des élus et qui ont un projet à présenter aux Français !
Une des dérives de ce mandat, c’est une politisation des institutions et une volonté de donner les clefs aux partis politiques plutôt qu’au peuple. Une orientation partisane est donnée à l’élection présidentielle, ce qui n’est ni son esprit, ni son équilibre. Retrouvez ci-dessous le texte de mon intervention sur ce sujet en séance à l’Assemblée nationale le 16 décembre 2015.
« J’aimerais partager avec vous les interrogations que soulèvent les deux propositions de loi du point de vue du responsable d’un parti politique qui, quoiqu’existant depuis de nombreuses années, ne fait pas partie des mastodontes électoraux dont les membres animent régulièrement notre vie politique. C’est également en tant qu’élu local issu de la partie rurale de l’Île-de-France que j’interviendrai, en particulier sur les horaires d’ouverture des bureaux de vote.
Les quatre sujets que vous soulevez dans vos propositions de loi, monsieur le président de la commission des lois, sont des questions importantes qui relèvent soit des principes du droit, soit des modalités opérationnelles et d’organisation du scrutin présidentiel.
À ce titre, elles doivent être étudiées. Cependant, ainsi que je l’avais indiqué en commission voilà quelques jours, les réponses apportées ne me semblent pas permettre de régler de manière satisfaisante les problèmes posés. Ce sera le point commun des différents sujets que je vais aborder.
Quitte à procéder dans le désordre, je commencerai par évoquer les parrainages. Lorsqu’on est chargé de diriger une campagne présidentielle ou qu’on est candidat, aujourd’hui, il nous appartient de récolter auprès des parrains éventuels le formulaire, le passe-droit que l’on stocke soigneusement dans un carton pour le transmettre ensuite au Conseil constitutionnel ; je me suis prêté à l’exercice pour le compte de quelqu’un d’autre, il y a une quinzaine d’années. La mécanique que vous proposez d’un dépôt direct des parrainages par leurs auteurs auprès du Conseil constitutionnel avec une publication régulière a un très gros inconvénient : elle ne permet pas au candidat de suivre l’état exact du nombre de parrainages déposés. Elle ne permet pas au candidat de savoir qui a tenu son engagement et qui ne l’a pas tenu.
En effet, et vous le savez bien, il y a un écart entre les premiers formulaires envoyés, les promesses de signature, et les signatures effectives, qui ne peuvent intervenir que dans le délai séparant la distribution du document officiel de la validation définitive.
Pour les candidats assurés d’obtenir des milliers, voire parfois plus de 10 000 signatures et parrainages, cela ne présente pas de problème. Pour les candidats tangents, c’est-à-dire ceux qui réunissent 500, 550 voire 600 parrainages, le fait de ne pas avoir de visibilité au quotidien est problématique. D’expérience, je peux vous dire que cette opération mobilise à plein temps plusieurs personnes, car il faut s’assurer de l’entrée des parrainages un par un lorsqu’on en dépose 520, 530 ou 540, comme ce peut parfois être le cas, quelques-uns pouvant toujours être invalidés. C’est donc une opération extrêmement délicate pour les formations qui ne disposent pas de la surface médiatique leur permettant de s’assurer, avant même de démarrer la campagne, l’obtention des parrainages. Pour le maintien du jeu démocratique, il me paraît essentiel de conserver le système
actuel, quitte à modifier, dans un souci de transparence et de respect de l’engagement républicain, les modalités de publication ; c’est d’ailleurs un de vos souhaits.Je vise ici bien davantage les modalités de collecte et de transmission officielle que la publication en tant que telle, sur laquelle je n’ai pas d’objection. La moindre des choses, quand on prend un engagement aussi important que le soutien d’un candidat à la présidentielle, c’est que cela se sache, sinon ce n’est pas la peine de se cacher derrière son petit doigt, à supposer qu’il ait la taille suffisante. En revanche, pour la collecte et la transmission, je pense qu’il faut maintenir le système actuel, quitte à l’enrichir et, pourquoi pas, le numériser. Les candidats doivent cependant conserver un contrôle quotidien actif et opérationnel sur les collectes de parrainages.
Deuxièmement, monsieur le président Bloche, je suis très circonspect sur le délai qui sépare la validation des candidatures par le Conseil constitutionnel du démarrage de la campagne officielle, délai que le texte vise spécifiquement. Je ne sais pas comment on peut estimer l’importance relative des candidats.
Et je ne sais pas comment on peut déterminer, en fonction de celle-ci, le temps de parole dont les candidats doivent bénéficier dans les médias. En effet, si on retient comme critère le résultat des élections précédentes, comment procéder si le candidat n’a pas représenté un parti politique qui a présenté des candidats lors des élections précédentes ? Si on retient comme critère le nombre de réunions publiques animées, faut-il considérer l’affluence moyenne, leur nombre, leur répartition géographique, la densité de population là où elles se déroulent ?
On voit bien qu’une telle méthode ne permet pas de s’assurer d’une équité incontestable, et que la répartition de temps de parole s’effectuera en réalité selon des éléments d’appréciation politique. En réalité, on ne sait pas réaliser un tel partage selon des critères objectifs.
En outre, et même si cela peut avoir pour conséquence de pénaliser relativement les candidats des formations politiques importantes, la nature même de l’élection présidentielle, qui n’est pas une élection partisane mais la confrontation d’une personne et de son projet politique avec le peuple français, exige de conserver une mécanique qui permette l’égalité des temps de parole des candidats, quitte à ce que les médias audiovisuels se disciplinent de façon un peu plus efficace pour éviter que les petits candidats soient amenés à faire du remplissage sur les plateaux de télévision parce qu’il leur manque une demi-heure ou quarante-cinq minutes à deux jours du terme.
J’ajoute que les candidats des partis les plus importants ne disent pas nécessairement les choses les plus inévitables et les plus utiles ; le débat public peut également s’enrichir de la présence de candidats de moindre importance ou supposée telle.
Troisièmement, concernant les horaires d’ouverture des bureaux de vote, il faut concilier plusieurs impératifs. Cher président Bloche, cher président Urvoas, vous l’avez dit, il faut contenir la publication des estimations des résultats. Vous avez rappelé la difficulté, monsieur le ministre, de maintenir dans les villages à faible densité de population la présence physique jusqu’à une heure raisonnable. Il faut également compter avec le mode de vie des urbains des grandes métropoles, qui rentrent assez tard le dimanche. À titre personnel, dans un souci de clarté, je plaide pour un horaire unique sur l’ensemble du territoire. Cela me paraît lisible, raisonnable et, en fin de compte, si tous les bureaux fermaient à dix-neuf heures, on pourrait ainsi concilier toutes ces exigences.
Il me semble qu’il pourrait y avoir un consensus autour de cette formule, contre laquelle il ne saurait y avoir d’opposition de principe.
Voilà ce que je souhaitais dire sur ces propositions de loi. »